Bonjour, je vous contacte car j'ai une amie d'enfance qui souffre d'anorexie mentale. Elle va bientôt avoir 30ans, elle évite tous les repas ou les prépare, nous regarde avec envie, est aujourd'hui lunatique, à fleur de peau continuellement et bien sur maigre. Nous (avec nos amies communes) avons déjà eu plusieurs discussions plutôt houleuses, nous lui avons conseillé de se faire aider. Mais elle ne nous écoute pas même si elle sait que quelque chose ne va. Elle était pulpeuse, drôle et souriante et c'est tellement triste de la voir comme ça aujourd'hui et ses parents se font rien. Maintenant que faire ? Je ne veux pas la braquer mais ne veux pas la laisser comme ça non plus, je ne sais plus...que me conseillez-vous ?
Un bébé à l'épreuve du couple
L'arrivée d'un bébé chahute, bouscule, remet en question, aussi bien soi-même que l'équilibre émotionnel du couple. Les statistiques parlent d'elles-mêmes, il existe en effet un nombre croissant de familles monoparentales (10 % des enfants de moins de deux ans) et à ce jour si environ un quart des couples se sépare après quelques mois suivant la naissance du bébé, ce chiffre ne cesse d'augmenter.
Je crois que vous touchez précisément là au noeud cornélien de cette maladie qui remplie une fonction de contrôle sur soi, son corps et son environnement. Comme toute chose, il est important d'être acteur de son désir de guérir pour que cela marche.
Dans le contexte de cette amie, elle a sans doute encore à ce jour plus de bénéfice à laisser sa maladie prendre le dessus qu'à tenter de la faire céder.
Rappelons nous que l'anorexie mentale est pernicieuse en ce sens que ce qui entrave la personne est la perception erronnee qu'elle a d'elle même.
Ce déni qui consiste à se voir différemment de la realité et de ce que perçoivent les autres protège la personne d'un risque bien plus grand: celui de mettre à nu ce qui l'a conduite à ne plus manger et bien souvent il s'agit du lien à l'enfance, au désir de ne pas grandir.Effacer les formes féminines permettent de plonger la personne dans le doux fantasme qu'elle peut stoper le temps et ainsi éviter de se confronter à la dureté que lui impose cette vie
d'adulte.
Tout ceci étant dit, il y a peu d'option qui s'ouvrent à vous, car si vous constatez que votre amie se détruit, cela vous renvoie aussi à votre impuissance.
Peut être pourriez vous parler avec elle de ce qui était si bon par le passé afin de repérer ce qui l'a faite souffrir autant. C'est seulement à ce moment là d'ouverture que vous pourrez peut être obtenir un assentiment au soin.
Il faudra peut être que vous lui "teniez la main", aller avec elle... pour voir un psy.
Parfois, les résistances sont si massives qu'il faut attendre que la personne atteigne ses limites pour entrevoir cette réalité. Les bénéfices s'inversent et le processus de travail thérapeutique peut s'engager.
Bien souvent il faut oeuvrer contre la personne et son désir, si vous estimez qu'elle se met trop en danger et procéder alors à une HDT hospitalisation à la demande d'un tiers. Ce peut être vous, un voisin, un membre de la famille qui appelle les urgences psychiatriques et demande à un psychiatre de passer au domicile pour réaliser l'entretien de pré hospitalisation (reforme récente).
Avec la signature du Medecin, la votre et celle d'un autre Medecin sur place, et si la situation le nécessite, elle sera soignée sous contrainte.
Les psychiatres cherchent le consentement du patient car sans lui, le travail thérapeutique est bien souvent inefficace.
L'intérêt de cette démarche est celle de faire
une sorte d'electro choque pour que la personne se rende compte de ce qui lui arrive, et cela peut parfois ouvrir à de nouveau aménagements psychiques.
Dans ce cas, attendez vous à être haïe par votre amie pour un certain temps. Mais c'est parfois une question d'assistance à personne en danger.
Je vous souhaite bonne continuation.
Celine Lemesle.
Céline Lemesle, Psychologue