bonjour Mme, j'ai 17ans je vie avec mes parents mes deux freres et une soeur. je ne me sens pas bien chez mes parents je suis en quelque sorte malheureuse, je n'ai pas vraiment une vie d'adolecente car mes parents me laisse jamais sortir même pendant les vacances(ex: pendant ces grandes vacances je vais rester à la maison jusqu'à la rentré) ... ils sont inquiet, toujours et ça m'aggace fortement de plus vus qu'on est une famille musulmane et parce que je suis une fille je n'ai le droit de rien faire je suis dans l'obligation de leur mentir et de faire semblant d'être à l'ecole pour avoir quelque moment de liberté ... je ne ressent même plus l'envie de rester avec eux j'ai envie de partir de chez moi, je n'oserai pas fugué parce que je ne sais où aller sinon je serais parti depuis bien longtemps ... mon copain je suis avec depuis bientot 3ans et je veux rester et passer mon temps que je passe allonger sur mon lit à rien faire avec lui mais ... je ne peux pas je suis comme séquéstrée ! je tremble des mains des jambes rien que d'y penser je n'ai plus d'appetit sachant que je suis gourmande et quand j'ai essayé d'en parler à ma mére elle me dit "chez nous c'est comme ça" et moi ça m'énerve ! je pleure en silence ! qu'est ce que je dois faire ?
Article 2 : Eduquer son enfant HPI : mode d’emploi
Première idée fondamentale : l’enfant HPI ne naît pas avec un mode d’emploi, pas plus que tout autre enfant d’ailleurs, mais avec lui ce sera probablement un peu plus complexe et demandera encore plus de bon sens et de cohérence, une communication juste et à bonne distance, des réajustements quotidiens, des rituels et de la pugnacité.
Publié le:
30/01/2020
Votre témoignage est touchant. Votre situation vous parait très complexe et sans issue probablement pour plusieurs raisons :
Vous avez 17 ans et c'est précisément à cet âge que l'on pense que notre vie restera celle la pour toute la vie. Le temps de l'adolescence, c'est le temps où on l'on vit dans l'instant présent, c'est le temps où l'on croit que rien n'évoluera jamais, mais c'est faux. Il n'y a que devenu(e) adulte que l'on s'en rend compte ! Malheureusement.... Ce ne sera que dans quelques années.
Vous avez aussi le sentiment que c'est votre culture musulmane qui influence les décisions de vos parents au sujet de votre éducation et qu'être une fille c'est un désavantage sur les garçons. Finalement c'est comme si les garçons étaient préférés aux filles. Je ne connais la pratique éducative de vos parents qu'à travers ce que vous m'en dites. Mais sachez que dans la plupart des familles et ce, quelque soit leur religion, les filles ont tendance à être plus « couvées » que les garçons, pour une raison qui est simple : les filles peuvent moins se défendre en cas d'agression et de recours à la force physique. Or, vouloir protéger ses enfants fait partie des devoirs parentaux, ils sont le gardien de la vie de leurs enfants et probablement parce qu'ils vous aiment, vos parents semblent vouloir accomplir cette mission... peut être un peu trop à votre gout, peut être un peu trop sans doute, compte tenu de votre âge... mais, même si cela ne fait pas plaisir, ils restent vos parents et ainsi les garants de l'autorité sur les enfants tant que les enfants habitent leur maison.
Vous vous sentez punie, telle une petite fille, alors que vous vous sentez devenir une femme, vous me parlez de votre ami avec lequel vous souhaiteriez passer plus de temps. Je ne sais pas si vos parents sont au courant de votre relation amoureuse, mais en tout cas, il vous est possible de le rencontrer et cela depuis fort longtemps. J'imagine alors que ce lien est fort entre vous et que votre ami peut aussi être source de réconfort, ce qui est heureux. La question de l'autonomie, de l'indépendance, ce n'est pas uniquement être en couple. Des sociologues disent à ce sujet qu'être autonome c'est être en mesure de loger seul (de financer son appartement) et de s'occuper personnellement de son intérieur (laver ses vêtements, faire ses courses, s'occuper des papiers administratifs...). C'est finalement être en mesure d'assumer les contraintes de cette vie « libre ».
Vous décrivez enfin des symptômes de déprime (perte d'appétit, envie de fuguer, difficulté à entreprendre des projets, pleurs, perte de votre élan vital.... ) que vous vivez de façon authentique et qui semblent être en lien avec votre sentiment de privation « de liberté », à un moment de votre vie où indéniablement vous avez besoin de découvrir un peu plus le monde.
Alors voici les conseils que je vous donne :
Je pense que vous ne devriez pas renoncer à parler à vos parents de vos sentiments. C'est l'absence de parole qui fait déprimer et qui cause les passages à l'acte comme les fugues, les addictions (alcool, tabac, comportements à risque....).
Il faut croire en vos parents mais peut être pas tout à fait de la façon dont vous pensez. Croire en vos parents, c'est peut être croire en leur capacité à vous parler de leurs choix, de leurs pensées, de la manière dont ils ont vécu leur adolescence, de la manière dont ils souhaiteraient que vous la viviez (en évitant probablement leurs erreurs...). Les parents ne veulent pas voir souffrir leurs enfants. Mais s'ils ne faisaient pas d'erreur, ils ne seraient pas de bons parents. S'ils étaient sans faille, sans fragilité, sans injustice vis-à-vis de leur enfant, ils donneraient un message de perfection à leur enfant : « si moi je suis sans faille, toi aussi tu dois être pareil » ! et cela est tout aussi dévastateur pour un jeune.
Vos parents sont sans doute effrayés à l'idée qu'ils vous arrivent quelque chose, car ils tiennent probablement à vous. Il serait alors intéressant d'en comprendre le sens caché, chez votre mère, chez votre père. Si vous ne pensez pas pouvoir en parler directement avec eux, peut être pourriez vous questionner d'autres membres de la famille, des personnes de confiance. Ces personnes pourraient vous renseigner au sujet de votre naissance, de ce qu'ils pensaient que vous seriez comme enfant, comme adolescente ou comme future adulte. Les parents ont souvent envie d'épargner les blessures de la vie à leurs enfants mais aussi qu'ils réussissent là où ils ont échoué. L'enfant devient comme une sorte de suite de l'histoire parentale, pour réparer certains échecs. Les parents n'ont pas forcément conscience de tout cela, et en parler peut parfois débloquer ces situations. Chacun redevient alors différent aux yeux de tous, chacun a alors le droit d'affirmer qu'il est différent, qu'il a d'autres envies ou d'autres besoins, sans que cela ne soit menaçant pour la famille.
Ce que je vous propose c'est de réfléchir ensemble aux liens qui vous unissent à vos parents et aux liens qui unit vos parents à vous, soit en en parlant directement avec eux soit par l'intermédiaire d'autres personnes afin que vous compreniez mieux le sens de ces interdits qu'ils vous posent. Vous verrez alors progressivement une réflexion en eux, peut être pourront ils assouplir certaines de leurs idées et se mettre mieux à votre place. Je vous conseille également de ne pas ramener les situations dont vos parents pourraient vous parler à vous même, car cela aurait alors l'effet inverse. Il est important qu'ils comprennent seuls à travers ces discussions les schémas qu'ils reproduisent peut être sur vous sans en avoir eu conscience jusque là.
Je crois aussi qu'il faut que vous les rassuriez sur votre maturité, qu'ils voient que vous pouvez être digne de confiance, que vous n'êtes pas une tête brulée... Vous pourrez alors négocier les choses pas à pas, attention à ne pas être trop gourmande, trop vite. Demandez-leur des choses acceptables pour eux, puis progressivement vous gagnerez un peu plus de terrain sur ce que vous souhaitez.
N'oubliez pas que votre vie ne s'arrête pas à votre adolescence, ni aux vacances scolaires ! Il est essentiel d'avoir des projets dans votre tête et que vous les meniez à bien, avec conviction et rigueur. C'est cela qui vous permettra d'accéder à votre indépendance future.
Je pense également qu'il faut être patiente, l'autonomie n'arrive pas si vite, elle se gagne avec le temps, et c'est très bien comme ça, ca évite de se séparer trop brutalement des gens que l'on aime pour d'autres choses et/ou d'autres personnes que l'on aime aussi.
Courage... donnez moi de vos nouvelles dans les prochaines semaines.
Céline Bidon-Lemesle, Psychologue Clinicienne, Formatrice
Céline Lemesle, Psychologue