Qu'est ce que l'adolescence ?
L'adolescence est une période particulière qui signe le passage de l'enfance vers l'adolescence. Il est important d'avoir en tête que nous sommes tous passés par cette phase, même si en tant que parents, elle a peut-être été un peu « oubliée ». Se souvenir de ce que l'on a ressenti, éprouvé, ou encore été à cette époque, permet aussi de se rapprocher de son enfant, qui traverse un bouleversement important dans sa vie et d'être également plus indulgent envers lui. La période de l'adolescence a évolué ces dernières décennies, elle s'est allongée et il apparait environ trois phases distinctes :
La pré-adolescence (à partir de l'entrée au collège vers 10-12 ans) :
c'est le moment où le jeune commence à se coiffer, se maquiller, se regarder avec plus d'intérêt dans le miroir. Son look et son attitude évoluent, de même que vis-à-vis de ses parents. Les haussements d'épaules deviennent quotidiens et signent une première tentative de remise en question de ses parents, de mise à distance de ce qui peut être dit et entendu.
L'adolescence à proprement parler (à partir de 12 ans et plus) :
c'est le temps des premières transgressions, des sorties en groupe, du temps passé au café entre copains et copines...Certains troubles peuvent être repérés et s'annoncent de façon plus aigue.
à la post-adolescence,
les contours sont plus flous. Il y a des adolescents tardifs. Ils connaissent des difficultés à s'autonomiser, à quitter le domicile parental et ont du mal à lui préférer un espace à soi.
S'il est assez simple de dater le début de l'adolescence, sa fin est plus complexe à définir.
Certains sociologues disent à ce sujet que l'acquisition et l'utilisation d'un lave linge chez soi signe la sortie de cette période, permettant « d'embrasser la vie d'adulte » par l'entremise de ce domicile qui devient sien, n'étant plus « chez ses parents ».
Les remaniements psychiques et comportementaux à l'adolescence
L'adolescent doit notamment renoncer à la pensée magique du petit enfant qu'il a été. Tout ce qui advient de lui le rend responsable de ses choix et attitudes. Lourd fardeau, parfois, que d'évoluer vers cet ailleurs si réaliste et entaché de frustrations multiples. C'est en quelques sortes « un deuil symbolique » important et nécessaire que le jeune doit négocier.
Beaucoup de jeunes adultes ont pu, à ce titre, évoquer leur sentiment de perte, comme s'ils devaient renoncer pour toujours à leur part d'enfant, cette période durant laquelle les soucis apparaissaient moins pénibles et envahissants, et où le jeu et le plaisir prévalent. Cette idée devient alors vite insupportable et irreprésentable.
L'adolescence pose aussi la question du temps, le temps qui passe et qui n'est plus tout à fait le même que lorsque l'on était enfant. Les choses s'accélèrent et c'est l'immédiateté qui prime et occupe toutes les pensées. Penser ce que l'on était avant ou ce que l'on va devenir plus tard peut être source d'inquiétudes, auxquelles les adolescents préfèrent ne pas songer.
De même, l'école peut devenir, pour certains d'entre eux, une préoccupation des plus optionnelles, au plus grand désespoir de leurs parents. De nombreux changement s'opèrent simultanément : changement physique, psychique, affectif et social. Alors que le jeune est en recherche de "plaire", il cherche avant tout à s'aimer lui-même pour séduire les autres. Les jeunes se retrouvent fréquemment en groupe et c'est justement pour s'affirmer et se rassurer face à cette quête de séduction. Notons aujourd'hui que certaines préoccuptions liées au " paraitre", peuvent être le lit possible de maladies, anorexiques notamment.
C'est également l'époque du meilleur ami, c'est celui sur lequel le jeune projette (lui attribue) toutes les qualités dont il aimerait se voir départir, laissant place à une idéalisation infinie et à une préoccupation parfois envahissante au regard de ces problèmes qui ne sont pas les siens. Il aimerait résoudre ces soucis, il s'identifie massivement à lui. Et cette relation passionnelle voire fusionnelle génère des inter-influences très fortes entre eux : si l'un ne va pas bien, l'autre éponge affectivement ces difficultés qui deviennent siennes. On préfère alors ses amis, son (sa)meilleur(e) ami(e), et également les parents de son meilleur ami à ses parents et membres de sa famille en général, ce que l'adolescent pourra dans l'après coup d'ailleurs critiquer, mais bien plus tard à l'âge adulte.
Comment reconnaitre un adolescent qui va mal ?
La plupart des adolescents vont bien, les trois quart d'entre eux. Seuls ceux qui connaissent des difficultés se retrouvent au sein des consultations psychologiques et/ou pédopsychiatriques. S'il est vrai que certains ados sont véritablement en souffrance, cette période apparait pourtant très difficile pour tout adolescent. Chacun doute de lui-même et, tous et toutes, à un moment donné, vont éprouver le besoin de produire de nouvelles expériences, et se risquer à des conduites limites, sans pour autant présenter de trouble psychopathologique.
Rappelons en effet que 70 à 80% d'adolescents ont commis au moins un vol, fumé un pétard ou encore se sont alcoolisés jusqu'à l'ivresse... Les adolescents mettent en jeu et en scène leur corps dans la conduite à risque. Tout adolescent cherche à se «cogner » contre les limites que lui impose son environnement. Mais ce n'est pas tant cette situation qui pose souci, mais plutôt celle qui s'accompagne de fragilité psychique. Les adolescents les plus fragiles vont davantage s'y confronter et risquent alors bel et bien cette fois-ci de se mettre réellement en danger (accident de scooter plusieurs fois par mois, alcoolisation régulière, provocations policières...).
Finalement il faut retrouver non pas un seul signe mais plusieurs signes de mal être et de conduite à risque pour conclure véritablement à un trouble psychopathologique de l'adolescent.
Alors, comment définir cet adolescent qui va mal ? Il s'agirait :
- d'un adolescent qui a des troubles du sommeil répétés (ne parvient pas à s'endormir, se réveille tôt au petit matin sans pouvoir se rendormir, ou encore dort la nuit mais aussi de façon importante en journée...). L'altération du sommeil a des conséquences sur l'humeur, les signes principaux étant l'irritabilité, l'agressivité verbale et/ou physique, les problèmes de concentration et de mobilisation des ressources intellectuelles....
- d'un adolescent qui ne se rend pas en cours et présente un absentéisme important en classe. On préfèrera des perturbations en classe plutôt qu'une inhibition scolaire persistante dans le temps, un repli, qui finalement risque de déboucher sur de l'isolement.
- d'un adolescent qui présente une dépression en toile de fond, et qui plutôt que d'exprimer un écroulement psychologique, va se montrer hostile et agressif envers son entourage. Cela peut déboucher sur de la violence verbale et physique envers autrui mais aussi se retourner contre lui-même sous forme d'automutilation, de scarification, de multiples piercing sur le visage et sur le corps...
- d'un adolescent, enfin, qui a des idées étonnantes sur la vie ou bizarres sur sa propre vie, qui doute de l'existence et du sens qu'elle a pour lui (tentative de suicide, T.S), qui ne parvient pas à anticiper positivement des choses pour lui, qui pense au total que rien n'ira pour lui à l'avenir, alors même qu'un adolescent a pour habitude de vivre dans l'action présente et de ne se soucier ni du passé, ni du futur.
Quel dénouement et quelles propositions thérapeutiques ?
La plupart des adolescents traversent cette période de leur vie de façon tumultueuse voire chaotique mais finirons par grandir et devenir des adultes responsables. Pour ceux là, l'un des conseils que l'on peut donner aux parents, c'est surtout de tenir bon. Car c'est après avoir tenté maintes et maintes fois d'ébranler le cadre parental, que l'adolescent finira par faire siennes ces règles qu'il aura si souvent tenté de déjouer, de faire virevolter et de remettre en cause.Tenir bon, c'est aussi accepter que cet enfant devenant adulte traverse des moments difficiles, en restant indulgent et patient, se souvenant de qui et de ce que nous étions à cette même période de notre vie.
Pour les adolescents éprouvant des remaniements identitaires plus intenses mais aussi plus couteux sur le plan psychologique, il est important d'offrir une issue positive à cette situation. Ce peut être aussi une seconde chance qui s'offre à eux de révéler leur détresse passée alors qu'ils étaient de petits enfants, n'ayant pas eu, à l'époque, l'occasion ou l'opportunité d'en parler.
Plusieurs orientations peuvent être envisagées avec le praticien en fonction des situations propres à chacun : examen psychologique, thérapie individuelle, groupe de parole d'ado, entretiens familiaux, internat, hospitalisations ponctuelles, médiations corporelles....
Céline Bidon-Lemesle, Psychologue Clinicienne.